7 décembre 2010

Révélations sur Passe-Partout I: le petit coupeur de paille

Comme Noël approche (et souhaitant augmenter la fréquentation de ce blogue!) j'ai décidé d'offrir au monde quelques révélations sur Passe-Partout. Rien de trop spectaculaire pour le moment; je garde le meilleur pour plus tard, si la foule en redemande!

Plusieurs se souviendront de cette comptine, chantée par Passe-Montagne, je crois:
Non jamais je n'oublierai
Le petit coupeur de paille
Non jamais je n'oublierai
Le petit coupeur de blé
Le petit coupeur de paille
Le petit coupeur de blé
Le petit coupeur de paille
Le petit coupeur de blé
Cette ritournelle accrocheuse soulève beaucoup de questions maintenant que les petits téléspectateurs sont tous devenus des adultes rompus à l'analyse littéraire : qui est ce mystérieux coupeur de paille et de blé? Est-il si mémorable en raison de sa taille ou de son âge (« petit ») ou pour une autre raison? Il est possible que la comptine ne veuille rien dire et ne vise qu'à transmettre l'attachement au monde paysan à la jeunesse urbaine pour laquelle Passe-Partout a surtout été créée, mais ce serait un peu décevant...

J'ai trouvé la chanson dans plusieurs recueils de chansons populaires françaises, par exemple Chansons populaires du pays de France (1903) de Jean-Baptiste Weckerlin; dans tous ces cas, la chanson est plutôt intitulée La fille au coupeur de blé. (Et a ici une mélodie différente ; l'auteur note que deux mélodies existent.)

Maintenant toutes les questions disparaissent, comme il est facile d'imaginer pourquoi la fille au coupeur de blé est mémorable, beaucoup plus que le coupeur de blé lui-même.
Il est intéressant de noter que quelque part entre la tradition et nos écrans de télé, la chanson a été « mise à jour ». Ce n'est pas nécessairement mauvais : les valeurs changent!

* * *

En passant, il y a un grand nombre de recueils de chansons traditionnelles disponibles gratuitement sur Google Books et sur Gallica. Après en avoir feuilleté quelques-uns, il me semble qu'un nombre disproportionné de chansons d'amour sont pour des femmes blondes, et le vocabulaire d'autres chansons, comme ici le blé et la paille, semblent suggérer l'or ou la blancheur. Il serait intéressant de retracer l'origine ou l'évolution de cette association toujours bien vivante blonde = belle, qui a pris racine jusque dans notre vocabulaire, où ma blonde = ma bien-aimée.

12 novembre 2010

Le Jour du Souvenir

À chaque année, le Canadian Club à Harvard organise une courte cérémonie pour le Jour du Souvenir. Ces dernières années, j'ai toujours eu un empêchement, donc j'y suis allé pour la première fois hier. J'ai été agréablement surpris du nombre de personnes, peut-être une trentaine? Ça peut sembler peu mais sur le campus un jour férié, c'est respectable. Nous avons chanté Ô Canada, avons lu In Flanders Fields, lu Ode of Remembrance, et chanté God Save the Queen, comme suit:
God save our gracious Queen
Long live our noble Queen
God save the Queen!
Qu'elle soit victorieuse
Heureuse et glorieuse
Que Dieu protège notre Reine
Vive la Reine!
Je dis « nous », mais je n'ai pas chanté cette chanson, pas pour une raison politique, mais parce que même si j'avais une connaissance « théorique » de God Save the Queen, je n'avais vraiment aucune idée de l'air, et j'ai été surpris de voir que les Canadians en chantaient même la moitié en français!

Photo de +shaun noonan+
Le 11 novembre est un jour férié aux États-Unis, le Veterans Day,  mais il n'y a pas de cérémonie particulière ou de souvenir vraiment, du moins chez la plupart des civils. Une amie canadienne suggère que l'importance de l'armée et l'esprit de constant « état de guerre » aux États-Unis empêche la tenue d'une journée spéciale pour se souvenir. Katie pense que la honte des guerres hégémoniques et la polarisation du discours empêche les éléments progressistes ou anti-militaristes d'avoir aussi de pareilles cérémonies.

Les Américains ne portent pas le coquelicot. Début novembre, sur le campus, on peut plus facilement reconnaître les Canadiens, comme plusieurs portent un coquelicot.

In Flanders Fields est un beau poème (par John McCrae) :
In Flanders fields the poppies blow
Between the crosses, row on row
That mark our place; and in the sky
The larks, still bravely singing, fly
Scarce heard amid the guns below.
We are the dead. Short days ago,
We lived, felt dawn, saw sunset glow,
Loved and were loved and now we lie
In Flanders fields
Take up our quarrel with the foe:
To you, from failing hands, we throw
The torch; be yours to hold it high.
If ye break faith with us who die
We shall not sleep, though poppies grow
In Flanders fields
J'aimerais le traduire en français... je vais peut-être commencer bientôt, mais attendre d'être un écrivain célèbre avant de la publier, parce que je fais face à une compétition sérieuse, et j'ai nommé la version officielle, dont je ne suis pas totalement satisfait et dont plusieurs d'entre nous connaissons au moins les premiers vers...
Au champ d'honneur, les coquelicots
Sont parsemés de lot en lot
Auprès des croix; et dans l'espace
Les alouettes devenues lasses
Mêlent leurs chants au sifflement
Des obusiers.
Nous sommes morts,
Nous qui songions la veille encor'
À nos parents, à nos amis,
C'est nous qui reposons ici,
Au champ d'honneur.
À vous jeunes désabusés,
À vous de porter l'oriflamme
Et de garder au fond de l'âme
Le goût de vivre en liberté.
Acceptez le défi, sinon
Les coquelicots se faneront
Au champ d'honneur.
C'était une belle cérémonie, et je suis retourné au travail (pas de repos pour les élus et les damnés!) un peu plus en paix avec l'idée du Canada.

31 octobre 2010

Il n'y a personne qui s'appelle Steve

Les diminutifs sont très communs, sont même la règle, aux États-Unis ; c'est le cas pour la plupart des noms, sauf les noms très courts. Par exemple, une femme qui s'appelle Katherine va plutôt utiliser Katie ou Kate dans la vie de tous les jours, et Catherine, Cathy. Certains noms ont plusieurs diminutifs; par exemple William (en français Guillaume) devient Will, Bill ou Billy. Aussi, plusieurs noms peuvent avoir le même diminutif, par exemple une Kate peut aussi s'appeler en fait Kathleen.

Ça m'a pris un peu de temps avant de comprendre le système. Dans mon programme, il y a plusieurs gars qui s'appellent Dave, mais dans tous les cas, sur papier, leur nom est David. Au début, j'ai pensé « tiens, c'est une drôle de coïncidence, tous ces David se font appeler Dave!» Le fait est que personne ne s'appelle Dave, et que sauf une très très rare exception, c'est un diminutif pour David. Même chose pour Steve, qui est le diminutif de Steven ou Stephen (en français Stéphane ou Étienne).
Une fois de temps en temps, je rencontre un(e) Américain(e) qui me dit: je connais un Québécois, et il s'appelle Dave (ou Steve). Il ne s'appelle pas David, sur papier il s'appelle Dave. It's so weird! Il n'y a personne qui s'appelle Dave!

Remarquez, il n'y a rien de mal à cela. L'incompréhension entre les peuples et les langues est probablement une source appréciable d'innovation linguistique. (J'ai souvent entendu des histoires expliquant l'origine des mots Canada, Istanbul et Kangourou par un malentendu, mais au meilleur de la connaissance de Wikipédia, ces histoires ne sont pas vraies.)

Quand je me présente en tant que Jonathan à des Américains, très souvent ils m'appellent Jon, parce que c'est la règle. Même certaines gens avec qui je communique fréquemment par écrit (courriel) où je signe Jonathan continuent de m'appeler Jon. Ou John, qui est la version anglaise de Jean. (Je connais deux ou trois John qui se font appeler Jonathan de temps à autre alors qu'ils sont juste des John, mais c'est une autre histoire.)

En passant, parlant de noms, quelle est la traduction de John Smith? Le mot smith est un forgeron, en moyen français fevre (aussi écrit febvre, fabre, etc. ; pensez à orfèvre en français moderne). Donc la traduction du nom très commun John Smith serait Jean Lefebvre (ou Jean Fabre, mais je crois que Lefebvre est plus commun au Québec.) C'est un jeu amusant. Par exemple, Stephen Harper devient Étienne Harpiste ; mais comme je ne connais personne avec le nom de famille Harpiste, peut-être que Étienne Courtemanche serait une meilleure traduction? (Il me semble que je ne voudrais pas jouer de la harpe avec des grandes manches.) C'est peut-être un bon jeu pour le temps des fêtes, avec celui qu'Olivier a proposé dans son billet sur l'architecture et le Vietnam...

28 octobre 2010

L’architecture en langue vietnamienne.

Je suis architecte.


J'étudie trop pour une profession où on apprend plus à la pratique, mais j'effleure quand même le travail, ici et là, maintenant à Tokyo, hier à Hanoi, au Vietnam.


Au Japon, c'est impossible de recevoir la moindre reconnaissance pour notre valeur professionnelle si on ne parle pas le japonais. Il faut plutôt apprendre à mettre notre sens critique à zéro, entrainer nos mains à accomplir des tâches comme le font les machines, tout en posant le moins de questions possible. Comme ça on nous fait bien comprendre que ça ne requérait effectivement aucune aptitude linguistique pour bosser chez les nippons. Je ne m'étalerai pas sur le Japon pour l’instant, mais pour des références sur les limites de l’amertume en sol asiatique, voir Stupeur et Tremblements (1999) d’Amélie Nothomb, ou bien sûr, Lost in Translation (2003) de Sofia Coppola.


Je choisis plutôt ici le Vietnam pour illustrer les quelques détours d’une langue étrangère dans la vie d'un jeune professionnel.


AH ! Le Vietnam.


J’y parle vietnamien, mais très modestement.

Je peux surtout y parler l’anglais avec une portée confortable. Ça fonctionne.

Mais je suis avant tout francophone. Et c’est là que ça devient rigolo.


L’architecture autre que celle vernaculaire (disons l’architecture au sens Beaux-Arts du terme) n’est pas réellement apparue au Vietnam avant que les français colonisent la région dans la deuxième moitié du 19e. Croyez moi, ceci est un billet qui essaie aussi d’être léger, je me permets donc quelques sauts chronologiques, pour dire qu’il existe au Vietnam toute une génération d’architectes (et donc de bâtiments) qui sont d’héritage « École des Beaux-Arts de Paris ». À un moment, le seul sceau d’architecte qui était valide était celui français. On gardait ainsi un bon contrôle sur la production architecturale. Les quelques pionniers vietnamiens qui ont pu aller étudier à Paris l’ont fait au moment où l’architecture mondiale passait de la « lourdeur » Beaux-Arts à la « légèreté » moderniste: un style international, avec des nouveaux procédés constructifs, des nouveaux outils, des nouveaux types de matériaux, des nouvelles technologies.




Que se passe-t-il alors, quand il faut trouver le vocabulaire pour cette nouveauté technique, dans une langue déjà à la portée du colonialisme ?



Vocabulaire Vietnamien …

… en Français

Bê tông

Béton

Xi măng

Ciment

Vít

Vis

Tuc nơ vít

Tournevis

Ê cu

Écrou

Bù loong

Boulon

Cờ lê / mỏ lét

Clé à molette

Cáp

Câble

Ê ke

Équerre

Com pa

Compas

Mét

Mètre

Lít

Litre

Am pe

Ampère

Đúp

Double

Ga

Gare

Xi lanh

Cylindre

Cao su

Caoutchouc

Vẹc ni

Vernis

Amiăng

Amiante

A xít

Acide

Ca rô

Carreau

Bi đông

Bidon

Ba lô

Ballot

Phin

Filtre

Pin

Pile (batterie)

Van

Valve

Ăng ten

Antenne

Côngtenơ

Conteneur

Lơ Cot-Buy-Giê

Le Corbusier

Ép phen

Eiffel

Ác si mét

Archimède


Et aussi pour la vie de tous les jours :


Gia nã đại

Canada

Giăm bông

Jambon

Kem

Crème glacée

Xà phòng

Savon

Phó mát

Fromage

Cát xét

Cassette

Sôcôla

Chocolat

Bích quy

Biscuit


Je ne connaissais que quelques mots, qui résonnent couramment dans le vocabulaire de tous les jours, mais je me suis aidé ici d’une liste relativement exhaustive trouvée sur un blog de jeune vietnamien. En bout de ligne, on y perd toutes idées de Beaux-Arts et même d'architecture. On bascule presque dans le "garagisme". Peu importe.


Dans toutes les langues, il y a beaucoup de mots en provenance des nouvelles technologies qui évidemment ont été internationalisés, mais ils sont presque toujours tirés de l’anglais.


Par exemple, cette semaine, j’apprenais à écrire en japonais (non, il n'est pas question du jeu de mots j'apprenais-japonais) :


コンピュータ, konpyuuta, computer, ordinateur.


Mais le degré d’étrange augmente quand, à l’autre bout de la planète, les mots de la vie courante sont empruntés au français, plutôt qu'à l'anglais. Ceci, bien sûr, dans la perspective qu’un héritage colonial infligé à un peuple puisse nous amuser, quand, quelques décennies plus tard, tout le monde est rentré chez lui.


Ça pourrait faire un beau jeu dans les partys de Noël : « Hey ! Devine qu’est-ce que le Viet raconte ! ».



Cô nhắc

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Pê đê

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Ca pốt

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Xu chiêng

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** Cognac – Homosexuel – Condom – Soutien-gorge

Les sacres québécois

Les localismes québécois me font maintenant sinon rire, sinon sourire chaque fois que je les entends.

"Maudit ksé platte." Maudit qu'j'entends pas ça assez souvent.

Un étudiant m'a envoyé un lien, récemment, vers un extrait du fil La Matrice où Wilson Lambert sacre en français. Je ne me souvenais plus de cette scène, ici.

J'ai dû lui répondre que les sacres chez moi sonnent très différemment. J'ai répliqué en envoyant une scène de Bon Cop Bad Cop, où un policier québécois donne quelques leçons de "sacrage" à un policier ontarien.

Ça m'a rappelé les leçons que je donnais à Toronto.

Mais vraiment, j'ai ri le plus en écoutant la lettre (le vidéo est nul) suivante, une plainte au Premier Ministre à propos du protocole de renouvellement des passeports.

Disons que je ris un peu jaune, en pleine campagne d'applications de recherche post-doctorale: les formulaires et exigences canadiennes sont vraiment à pleurer.

19 octobre 2010

Les nouvelles scientifiques en français

Quand j'étais jeune, je consommais beaucoup de vulgarisation scientifique en français. Si j'exclus les livres qui ont un « cycle de vie » différent, mes sources étaient les émissions de qualité à Radio-Canada et Télé-Québec, Québec Science à la bibliothèque, le journal (nous avions Le Soleil à la maison) et, plus tard, le Web. Aujourd'hui, comme je travaille en science et que je n'ai plus accès à la télévision québécoise (je n'ai pas de télé, de toute façon! Et tou.tv ne marche pas aux USA...) la vulgarisation que je rencontre m'arrive par hasard soit sur Cyberpresse, soit parce que mon père garde des articles du Soleil et du Journal de Québec qu'il me donne quand je vais chez mes parents. Il m'arrive souvent de ne pas comprendre ce dont il est question parce que la découverte est « trop vulgarisée », alors quand ça pique ma curiosité je dois rechercher le nom de l'auteur cité dans l'article sur Internet pour trouver un meilleur article en anglais (les articles en anglais ne sont pas tous meilleurs, mais il y a une bien plus grande variété de sources) ou remonter à la page du chercheur ou l'article original. Les nouvelles scientifiques sur Cyberpresse (la version électronique de La Presse et du Soleil) leur viennent à travers l'Agence France-Presse et sont de piètre qualité. Je lis de moins en moins le site Web de Radio-Canada ; leurs nouvelles scientifiques ont souvent la même provenance, mais sont éditées par Radio-Canada.

« notre » amas de galaxies
La semaine dernière, un article écrit par mon groupe de recherche est paru dans le Astrophysical Journal, et en même temps (soit le 13 octobre), un communiqué de presse (disponible ici) a été publié par Harvard-CfA. (Ne cherchez pas mon nom, il n'y apparaît pas comme je suis deuxième dans la liste des auteurs!) Nous avons été surpris de voir à quelle vitesse la découverte, intéressante mais pas révolutionnaire, a été reprise par la presse. Dès le lendemain matin, le 14, la nouvelle était publiée à plusieurs endroit, et en fin d'après-midi, une recherche pour « Brodwin » (l'auteur principal) sur Google News donnait le nombre d'articles suivant:
31 en anglais
25 en russe
8 en espagnol
1 en estonien.

La nouvelle est assez populaire pour s'être retrouvée à la une de digg il y a deux jours.

Ce matin (le 19 octobre), par curiosité, j'ai fait la même recherche, pour trouver:
59 en anglais
39 en russe
27 en espagnol
12 en chinois
2 en hongrois
2 en vietnamien
2 en allemand
1 en japonais
1 en polonais
1 en finnois
1 en indonésien
1 en slovaque
1 en néerlandais
1 en tchèque
1 en roumain

C'est anecdotique, mais je ne suis pas surpris de voir que le français ne s'y trouve pas. Si la tendance se maintient, 3-10 jours l'Agence France-Presse va traduire le communiqué de presse, peut-être l'éditer un peu pour le rendre moins précis, et ce sera là la diffusion en langue française.

Je n'ai pas de problème à ce que des fils de presse existent pour les nouvelles internationales, mais je constate qu'ils semblent être moins bons en français que dans une multitude d'autres langues pour les sciences. Quels en sont les impacts est une question difficile à répondre, mais je doute que ce soit positif.

Il y a aussi que sur le Web, le français est sous-représenté. Mais ça c'est une autre question à laquelle je vais revenir. Quant à la nouvelle en question, je veux bien l'expliquer en français. Mais je vais attendre de 3 à 10 jours pour voir si ma prédiction se réalise.

15 octobre 2010

Spéculation sur l'identité de Marie Stella, les deux pieds dans le chocolat

Qui est-ce qui l'a c'est Marie Stella
Les deux pieds dans le chocolat
C'est une comptine qui faisait partie d'un jeu avec un ballon, quand j'étais jeune, et que plusieurs Québécois doivent connaître. En tant qu'adulte, deux questions me viennent immédiatement à l'esprit:
Q. Qui est cette mystérieuse Marie Stella?
Q. Pourquoi a-t-elle les deux pieds dans le chocolat? (Ça semble n'avoir aucun sens!)

Je pense pouvoir répondre à ces deux questions. Pour vrai.

Description du jeu

Si je me souviens bien, le jeu va comme suit, et demande au moins trois joueurs et un ballon. L'un des joueurs commence avec le ballon, appelons ce joueur « la Poule » ; c'est une terminologie standard à St-Charles-de-Bellechasse. La Poule lance le ballon derrière elle, puis les autres attrapent le ballon et forment un rang, avec les mains derrière le dos, où l'un des joueurs cache le ballon. Les joueurs disent ensemble:
Qui est-ce qui l'a c'est Marie Stella
Les deux pieds dans le chocolat!
La Poule se retourne, et essaie de deviner qui a le ballon. Si elle perd, elle reste la poule, sinon celui ou celle qui avait le ballon devient la poule. Simple non?

(Comme le but du jeu est manifestement de ne pas être la poule, avec le recul il me semble que la stratégie optimale aurait été de ne jamais prendre le ballon derrière son dos et de laisser les autres le faire, mais bon je suis probablement plus compétitif que la moyenne des enfants de six ans. Mmmm... J'en informerai mes enfants et ils gagneront toujours contre leurs cousins!)

La stella maris

Je me suis mis à penser à tout ça parce qu'hier je suis tombé par hasard sur maris stella, l'étoile de la mer, un autre nom pour l'étoile polaire et pour Notre-Dame-de-l'Assomption, un avatar catholique de la vierge Marie. L'ordre des mots étant moins important en latin (grâce au cas), on dit aussi stella maris (par exemple dans la belle chanson Je ne veux pas dormir ce soir de Jean-Pierre Ferland).

Ave Maris Stella est un hymne des vêpres et une prière autorisée pour la liturgie des heures catholique.
Ave maris stella,
Dei mater alma
Atque semper virgo
Felix caeli porta

Drapeau Acadien - Photo de djking
La stella maris est l'étoile jaune sur le drapeau Acadien, et il se trouve que Ave Maris Stella est l'hymne national Acadien.

Mon hypothèse

Comme le nom Marie Stella (ou le prénom Marie-Stella) est peu fréquent, je propose donc que la comptine est née de la prière latine (à travers l'Acadie ou la religion, peu importe ; cette supposition est probablement impossible à prouver, mais raisonnable...) Donc

Q. Qui est cette mystérieuse Marie Stella?
R. Elle est nulle autre que Maris Stella, c'est-à-dire Notre-Dame-de-l'Assomption, c'est-à-dire la vierge Marie. En ce sens, la comptine est blasphématoire.

Q. Pourquoi a-t-elle les deux pieds dans le chocolat? (Ça semble n'avoir aucun sens!)
R. Si la comptine est en effet inspirée d'un texte latin, un enfant (ou autre inventeur de comptines) ne parlant pas latin y substituera un texte français n'ayant aucun sens.


Photo de keinepanik